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Vivre leur Villes
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  • Deux ethnologues en herbe partent se faire les dents 6 mois en Afrique suivis de 6 mois en Amérique du Sud. L'objectif : faire un reportage sur les conditions d'habitat des nouveaux arrivants urbains.
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20 janvier 2010

Urbanisme françafricain de 1970 à nos jours (partie 2)

      

       Un article précédent portait sur l’interventionnisme français pendant la période coloniale, concernant de grandes villes d’Afrique francophone, dont Ouagadougou. Cette article est la suite chronologique du précédent et s’étend jusque dans les années 1990-2000. Toujours la même idée directrice étant de savoir comment les politiques urbaines françaises, notamment et surtout au Burkina Faso, ont-elles contribué sinon créé les déséquilibres urbains, sociaux et économiques en cour dans le pays ?

       

         Repartons des années 1970.  L’indépendance se digère lentement et la France, en tant qu’ancien colonisateur, continue sont intervention dans le pays. Cependant, son influence va connaître un recul important qui n’est pas dû à la seule prise d’indépendance du pays. En ce qui concerne les politiques urbaines et la gestion des villes, il est surtout dû à l’incapacité des ingénieurs et hauts techniciens français à produire des plans d’urbanisme stables et vivables pour les principales villes du pays, avec en tête la grande Ouagadougou voulue par la France. Pour exemple, après de multiples échecs des ingénieurs français, c’est un bureau d’étude néerlandais qui produira à la même époque le schéma d’urbanisme et d’aménagement urbain (SDAU) de la ville de Ouagadougou. Les administrations françaises en charge de l’urbanisme se rabattront sur les SDAU secondaires comme celui de Bobo-Dioulasso.

         

          Ce recul français, notamment sur les capacités à gérer et organiser le développement urbain, n’est pas synonyme d’un recul des investissements et de l’intervention française. Les aides bilatérales que reçoit le Burkina viennent encore de la France dans leur grande majorité. Néanmoins, comme le font tous les autres empires coloniaux, il faut avec l’indépendance, laisser l’illusion de l’autonomie des nouveaux états et agir plus discrètement à travers des structures de coopération, ou des organismes de financement.  Ainsi est créé par les français le fond d’aide et de coopération (FAC) qui va fournir au Burkina la plupart de son budget d’investissement public urbain, ou pour être plus clair encore, qui va prendre en main et diriger selon ses propres souhaits l’urbanisation du Burkina Faso. Le FAC va ainsi grossir le déséquilibre entre Ouagadougou, la capitale, et les autres villes du pays. La grande victime en sera Bobo-Dioulasso. Chaque année, la capitale reçoit entre 50 et 100% des investissements pour le développement urbain. La seule année 1963 verra Bobo obtenir les aides du FAC pour la construction de son grand hôpital et pour sa maison de la radio. Par conséquent, les infrastructures des villes secondaires dépérissent, les quartiers se dégradent, les projets ne sont pas financés et chacune regarde donc Ouagadougou grossir son ventre.

Sur les 390 millions de francs français injectés par le FAC entre 1959 et 1985, 280 sont engloutis par Ouagadougou.

         

     La répartition des investissements de la FAC est là aussi assez surprenante. Voici leur décomposition :

            

   41%   Enseignement

            18%   Santé

            14%   Aménagement urbain

            10%   Equipements socio-culturels

   8%     Administration

            6%     Infrastructure

   4%     Equipements économiques

   3%     Habitat

            

            L’enseignement est somme toute très important, mais on peut s’étonner des 14% d’aménagement urbain et des 6% d’infrastructure pour ce qui est, à la base, une politique urbaine. C’est vrai qu’il est essentiel d’aller à l’école pour obtenir des diplômes, mais avec 3% d’équipements économiques, on se demande bien où aller travailler avec ce diplôme. C’est ce qu’on peut parfois observer ici, beaucoup de diplômés , très peu de travail parce qu’aucune entreprise. La France a fait construire plus de centres culturels qu’elle n’a crée d’entreprises.

L’intervention française s’est limitée à la grande ville de Ouagadougou sans élargir son action, même après l’indépendance. Elle a privilégié des réalisations de prestige et celles qui assureraient définitivement sa présence au Burkina Faso. Ouagadougou a fait figure d’exemple des stratégies d’urbanisation à la française pour les villes françafricaines. Il reste à savoir si ce constat est une conséquence du vieux pacte colonial ou une absence de savoir-faire, un peu difficile à envisager.

L’arrivée du général Sankara en 1983 n’a pas changé grand chose, car même si ses politiques de financements nationaux et de développements des villes auraient pu connaître le succès, son assassinat rapide a surtout laissé une trace de sang dont se remet mal le Burkina Faso.

               

                Dans le cas de la ville de Bobo-Dioulasso, où nous étions il y a encore quelques jours, les conséquences ont été des plus dures depuis les années 1960 jusqu’à tout récemment, et les politiques urbaines françaises ont largement étouffé la ville. D’une capitale économique dans les années 1970, elle n’est aujourd’hui qu’une annexe de Ouagadougou. Elle était pourtant un des grands centres commerciaux d’Afrique de l’ouest, ce qui explique encore aujourd’hui son envergure cosmopolite. En effet, située à un carrefour de routes commerciales, elle était directement desservie par Abidjan. Mais le durcissement des frontières de plus en plus étanches et la déviation de toutes les grandes routes commerciales vers Ouagadougou, ont eu raison de la ville. Les années 1990 ont donc été particulièrement dures pour la ville dont les infrastructures viennent à manquer et où la recherche d’un emploi se termine souvent par « du travail, c’est possible, mais il faut déménager à Ouagadougou ».

Triste constat pour une ville dont la population est idéalement jeune pour être dynamique et où la situation écologique naturelle est excellente pour tout type d’exploitation

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Commentaires
J
un truc qui m'a toujours paru bizarre : toujours pas de tout à l'égout dans les villes. la france aurait tout apporté (ou presque, oups!) sauf la propreté? les néerlandais non plus d'ailleurs.<br /> <br /> "il est surtout dû à l’incapacité des ingénieurs et hauts techniciens français à produire des plans d’urbanisme stables et vivables" : pour quelles raisons?<br /> <br /> "La France a fait construire plus de centres culturels qu’elle n’a crée d’entreprises": il fallait bien que les coopérants aient de la lecture! des artistes français en concert! des expo d'expat! tout ce qu'on a eu en 1988 quoi!<br /> <br /> et puis s'il n'y avait pas eu la coopération française juju, tu serais pas là.<br /> <br /> @+
J
oui, des commentaires de voyages ... et puis du vaudou hein ! plein d'vaudou, rapport au type qui pendant la sieste...
M
VOS COMMENTAIRES SONT TOUJOURS très intéressant et percutant mais on aimerait aussi avoir des recits de voyages personnels avec vos impressions vos émotions , vos anecdotes pour vivre un peu votre quotidien avec la population locale .Comment sont les marchés , les paysages ...<br /> Rayonnez vous un peu ? Comment vous déplacez vous ? <br /> Enfin j'exagére un peu parce que je suppose que ce n'est pas toujours évident de nous écrire !!!<br /> On vous embrasse très fort<br /> Mimie dit" picasso"par papa cayla
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