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Vivre leur Villes
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  • Deux ethnologues en herbe partent se faire les dents 6 mois en Afrique suivis de 6 mois en Amérique du Sud. L'objectif : faire un reportage sur les conditions d'habitat des nouveaux arrivants urbains.
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22 décembre 2009

Urbanisme françafricain de 1945 à 1965 ....

        La récente lecture d'un livre intitulé La France et les villes d'Afrique noire francophone : 40 ans d'intervention (1945 - 1985) écrit par Sophie Dulucq, nous a amené à prendre du recul sur la situation de la ville de Bobo-Dioulasso. Et puisque nous travaillons sur la zone non lotie du secteur 22, ou "bidonville", l'éclairage de l'auteur sur le rôle de la France (coloniale mais aussi post coloniale) permet de replacer ce que nous observons dans un contexte historique plus large.

     Le propos de l'auteur s'intéresse principalement à deux points. Premièrement, il observe la gestion urbaine des villes africaines occidentales sous domination française. Principalement le Mali, le Niger et le Burkina Faso à travers Bamako, Niamey et Ouagadougou. D'autre part, il étudie les investissements publics et l'interventionnisme français dans ces colonies, surtout après 1945 jusqu'aux années 1990. Car même si un pays comme le Burkina (qui nous intéresse ici) obtient son indépendance en 1960, la France continue son ingérence bien après, notamment avec des structures d'investissements et de financements qui remplacent, au fur et à mesure les anciennes structures coloniales. Avec l'indépendance du pays, les noms des institutions ont changé mais, jusqu'en 1983 et l'arrivée de Thomas Sankara, le fonctionnement structurel reste profondément colonial et sous domination française.

     Seul le cas du Burkina, et particulièrement celui de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso, seront développés ici. Comment donc la gestion urbaine, la création d'un mode d'urbanisme colonial et l'organisation de l'intervention française et de ses investissments a-t-elle influé sur le façonnement des deux grandes villes du pays ? (qui comprennent l'énorme majorité de la population urbaine).

      D'abord, la situation d'après guerre dès 1945. A l'époque, deux grandes administrations gèrent péniblement l'urbanisme : la direction des tavaux publics et le service du CADASTRE, et ce, presque depuis le début de la période coloniale. Ces structures administratives restent instables car destructurées et sans véritable plan d'urbanisation. Leur impact sur les villes de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso est donc unilatéral. Elles se contentent de lotir de nouvelles zones urbaines. Le lotissement demeure en effet "le principe d'amménagement fondamental" depuis le début de la domination française. Plusieurs défauts sont soulignés. En premier, le lotissement systématique, qui provoque une utilisation médiocre de l'espace : les voies et réseaux sont trop longs et trop larges, les parcelles découpées pour les habitations sont trop grandes et ne tiennent pas compte d'une future augmentation de la population de la ville. Aucune prévision n'est pensée, on lotit sans chercher à comprendre les logiques d'évolution d'une ville, son extension, et la probable exode rurale qui va la gonfler.

     L'après 1945 marque un autre changement majeur. Jusqu'en 1945 demeure un certain équilibre entre Ouagadougou et Bobo-Dioulasso. Ouagadougou était certes la capitale économique et administrative, mais Bobo-Dioulasso, véritablement cosmopolite, était un carrefour commercial essentiel au pays, étant directement servie par la grande ville d'Abidjan en Côte d'Ivoire. Elle figurait donc comme la capitale économique. Cependant, de 1947 à 1960, l'énorme majorité des investissements publics vont aller à Ouagadougou. Le grand amménagement d'une capitale coloniale moderne telle que la France le désire s'ammorce à Ouagadougou :

"Bobo paie, par la stagnation, l'amménagement de la capitale".

     L'indépendance du Burkina en 1960 ne change pas grand chose. Bien sûr, les ministres français laissent leur place à des ministres burkinabe, mais ingénieurs, architectes et techniciens français conservent des hauts postes dans l'administration. La continuité est de mise. L'amménagement de la ville et des espaces urbains garde le même fonctionnement, et le "lotissement systématique" se perpétue. Pourtant, l'arrivée dans les années 1960 de nombreux urbains, et la politique de lotissement au coup par coup, n'arrive plus à suivre la demande et les besoins de la population.

    Se créent donc de nombreuses "zones d'habitations spontannées" qui augmentent alors sans cesse. Les administrations en charge de l'urbanisation sont incapables de gérer l'agrandissement de la ville, et depuis 1945 tous les ingénieurs ayant eu en charge la création d'un plan d'urbanisme pour Ouagadougou ou Bobo-Dioulasso ont été incapables de les réaliser. Par conséquent, les nouveaux arrivants urbains achètent un peu partout des bouts de terre à la périphérie de villes. Pas d'ordre, pas d'organisation. Là où l'on peut s'assoir on s'assoit pour vivre tant bien que mal.

     Les zones non loties que nous observons sont les résurgences de cette gestion urbaine. Pour exemple, ces "zones d'habitation spontannées" vont représenter, dans les années 1980, plus de 60% de la superficie de la ville de Ouagadougou. La France, quant à elle, a construit de belles administartions coloniales, de beaux quartiers coloniaux, et on ne peut le lui enlever, pas mal d'écoles. Pourtant, elle n'a rien prévu pour ces populations, ni investissements, ni réflexions urbaines.

     Comme on nous le dit souvent à propos du bidonville que l'on étudie, ces zones non loties sont des espaces où les gens ne sont "ni vraiment debout ni vraiment assis". Du jour au lendemain, la mairie peut venir leur dire de se lever et les sommer de partir, tout comme elle peut lotir la zone et leur permettre de s'asseoir. Ils restent donc dans cette situation inconfortable, en attendant que la ville décide de leur avenir.

fr_colo

La suite sera publiée dans un article à suivre...

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Commentaires
J
très intéressante analyse qui va bien sur dans le sens de l'ethnologue. je vais essayer de me faire "l'avocat du diable".<br /> quand vous écrivez "on lotit sans chercher à comprendre les logiques d'évolution d'une ville", quelles sont ces logiques dans un pays comme le burkina (ou plutot la haute volta de l'époque)?<br /> "Leur impact sur les villes de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso est donc unilatéral": quel était l'interlocuteur de la france et que proposait-il? en particulier à la place du lotissement?<br /> à quoi ressemblait ouaga avant 1945? ouaga en tant que grande ville aurait-elle existé sans la colonisation? si oui, à quoi aurait-elle ressemblé?<br /> "Pourtant, elle n'a rien prévu pour ces populations": à votre avis, qu'auraient voulu les populations migrantes.<br /> dernière question: pourquoi les ruraux viennent-ils à ouaga?<br /> <br /> voilà, à suivre. énaurmes bisoux.<br /> papa
M
salut les amis!!!!<br /> <br /> ba voila jvoulais vous souhaiter un joyeux noel sur la terre des hommes integres!!!<br /> et j'aimerai savoir ou vous allez par la suite, quel direction? pays? combien de temp (si vous savez)!! voila!! bonne continuation!!*<br /> la biz
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